
Venezuela: des licences de pétroliers révoquées par Washington

Le Venezuela a annoncé dimanche soir que les Etats-Unis ont révoqué les licences "des entreprises transnationales de pétrole et gaz" qui avaient obtenu le droit d'avoir des activités dans le pays malgré les sanctions destinées à évincer le président Nicolas Maduro du pouvoir, ce qu'a confirmé lundi le pétrolier français Maurel & Prom.
Loin d'être une surprise, cette mesure de Donald Trump confirme que le nouveau président américain cherche à asphyxier économiquement le Venezuela et faire tomber M. Maduro.
En outre, M. Trump menace tout pays acheteur de pétrole vénézuélien d'une augmentation de 25% des droits de douane pour toutes ses marchandises exportées vers les Etats-Unis.
Caracas n'a pas cité les entreprises visées, mais le pétrolier français Maurel & Prom a confirmé lundi que les Etats-Unis avaient révoqué sa licence obtenue en mai 2024.
Le groupe a spécifié avoir obtenu "une licence de transition" l'autorisant "à effectuer les transactions nécessaires à la conclusion des opérations précédemment couvertes par la licence désormais révoquée", jusqu'au 27 mai.
L'américain Chevron avait déjà vu sa licence révoquée fin février. Les experts s'attendent à ce que l'espagnol Repsol soit également concerné.
Le Wall Street Journal a pour sa part rapporté samedi que Washington a ordonné à Global Oil Terminals, du magnat Harry Sargeant III, de cesser ses opérations au Venezuela.
- "Préparés" -
L'italien Eni, qui produit du gaz, et l'indien Reliance Industries devraient aussi être concernés par les révocations de licences américaines.
Chevron produit quelque 220.000 barils par jour, Repsol environ 65.000 et Maurel & Prom environ 20.000, selon des experts.
"Je tiens à informer que nous avons maintenu une communication fluide avec les entreprises transnationales de pétrole et de gaz ayant des activités dans le pays, et qu'elles ont été informées, ces dernières heures, par le gouvernement des Etats-Unis, de la révocation de leurs licences", a écrit la vice-présidente Delcy Rodriguez dans un communiqué sur les réseaux sociaux.
"Nous étions préparés à cette conjoncture et nous sommes prêts à continuer à honorer les contrats avec ces entreprises, dans le cadre de la Constitution de la République et des lois vénézuéliennes. Comme nous l'avons toujours soutenu, les entreprises internationales n'ont pas besoin de licence ni d'autorisation de la part de quelque gouvernement étranger", a-t-elle précisé.
Toutefois, les entreprises qui enfreindraient l'embargo et les directives américaines se verraient sanctionner par Washington.
Le président Donald Trump a révoqué fin février la licence du pétrolier Chevron. Octroyée par le précédent président Joe Biden, elle permettait à l'entreprise de travailler dans le pays malgré les sanctions. Dans le sillage de Chevron, d'autres avaient bénéficié de licences.
M. Trump, qui avait initialement donné à Chevron jusqu'au 3 avril pour clore ses opérations, a prolongé la limite d'exploitation jusqu'au 27 mai.
L'administration américaine ne reconnaît pas la réélection du président Maduro en juillet 2024, alors que l'opposition qui crie à la fraude revendique la victoire.
- Spectre d'une nouvelle crise -
Le Venezuela dispose des plus grandes réserves pétrolières de la planète. Mais sa production, après avoir atteint un record de 3,5 millions de barils par jour au début des années 2000, avoisine aujourd'hui le million en raison d'une mauvaise gestion, de la corruption ainsi que des sanctions américaines de 2019.
Le pays a vu son PIB fondre de 80% en huit années consécutives de récession, entre 2014 et 2021, à cause notamment de la forte baisse des prix du pétrole et de sa production, tombée à un plus bas historique de 300.000 barils/jour avant de remonter.
Environ huit millions de Vénézuéliens ont fui leur pays en raison de la crise économique et politique.
Le spectre d'une nouvelle crise, avec pénurie et hyperinflation, refait son apparition. Le dollar au marché noir s'est envolé par rapport au dollar officiel ces derniers jours.
"Chevron est l'un des principaux fournisseurs de devises dans le secteur bancaire", soulignait récemment auprès de l'AFP le consultant César Aristimuño, ajoutant que le départ du géant américain "a immédiatement suscité une grande inquiétude au Venezuela".
Ceux d'autres multinationales vont priver un peu plus Caracas de recettes et de devises.
C.W.Kuhn--BlnAP